Par Shayp, en collaboration avec le Professeur Marnik Vanclooster de l’Institut Earth and Life de l’UCLouvain
À première vue, les régions européennes semblent disposer de ressources en eau abondantes car elles sont généralement caractérisées par un climat tempéré. Les techniques durables en matière d’eau ne sont que rarement mises en avant parce que la disponibilité de l’eau n’est pas habituellement considérée comme un enjeu majeur. C’est d’autant plus vrai pour la Belgique, un pays souvent qualifié de pluvieux. Cependant, au cours de ces dernières années, la création de la Cellule sécheresse de la Région wallonne, la mise en œuvre d’un Blue Deal par le gouvernement flamand ainsi que la mise en place de restrictions sur l’utilisation de l’eau au sein de plusieurs communes belges pendant l’été ont révélé au grand public le risque grandissant de pénuries d’eau. Où en est la Belgique en termes de disponibilité en eau ? Est-ce un sujet de préoccupation ? Cet article se propose de lever le voile sur ces questions, avec l’aide de Marnik Vanclooster, Professeur et chercheur en hydrologie et gestion de l’eau à l’Institut Earth and Life de l’UCLouvain.
Les pénuries d’eau se produisent généralement dans les zones à faible pluviométrie (AEE, 2020). La Commission européenne (CE) définit une pénurie d’eau comme « l’insuffisance en ressources hydriques pour subvenir aux besoins moyens à long terme » (CE, n.d.). Il s’agit donc de déséquilibres hydriques résultant de la combinaison d’une « faible disponibilité en eau avec un niveau de demande en eau qui dépasse la capacité de production du cycle naturel de l’eau ». Les sécheresses, quant à elles, résultent d'une diminution temporaire de la disponibilité en eau et peuvent survenir partout en Europe à toute saison, bien que les régions disposant de faibles ressources en eau ou dans lesquelles ces ressources ne sont pas gérées correctement, soient les plus affectées par les sécheresses.
Depuis 30 ans, les épisodes de sécheresse en Europe sont plus fréquents et sévères (CE, n.d.). Cela vaut tout particulièrement pour les régions du Sud mais le phénomène se répand au Nord, y compris en Belgique. Les pénuries d’eau saisonnières sont toujours plus nombreuses et leur nombre se multipliera à l’avenir. Ainsi, ce n’est plus uniquement un faible niveau de précipitations qui définit un risque de pénurie d’eau. Les pratiques durables en matière d’eau en Belgique sont devenues importantes, non seulement pour combattre les pénuries d’eau saisonnières mais également pour réduire les effets de la baisse du niveau des nappes phréatiques (Maes et al., 2020).
Il peut sembler paradoxal de parler de pénuries d’eau et de sécheresses dans un contexte belge, quand le pays est connu pour être nuageux et pluvieux. Cependant, selon Professeur Vanclooster, « bien que la Belgique soit située dans une région à climat tempéré, elle court le risque de pénuries d’eau. Cela est dû à un ensemble de facteurs susceptibles de causer des situations très critiques dans un avenir proche ».
Le Professeur évoque en premier le degré élevé d’imperméabilisation des sols. En Belgique, la densité élevée de la population ainsi que l’urbanisation continue accentuent ce phénomène. Marijke Huysmans, spécialiste des eaux souterraines, souligne que la végétation est peu à peu remplacée par le béton et l’asphalte (Universiteit van Vlaanderen, 2020), ce qui empêche l’eau de s’infiltrer dans les sols et de demeurer dans les sous-sols des nappes phréatiques.
Un second élément est la forte demande en eau. La croissance démographique et la forte densité de population en Belgique sont des éléments qui ont un impact significatif sur la demande en eau, tant dans le passé que dans les décennies à venir. Le Professeur signale que « l’empreinte de l’eau en Belgique est très élevée en raison des habitudes de consommation d’eau de l’économie belge, des différents secteurs et des citoyens qui sont élevées et surpassent la quantité de ressources renouvelables ». En effet, la Belgique possède une activité industrielle intense dont la consommation en eau est relativement élevée par rapport à la disponibilité d’eau douce renouvelable, comme le montre l’Indice d’exploitation de l’eau créé par l’Agence Européenne pour l’Environnement.
Troisièmement, l’impact du changement climatique sur la disponibilité de l’eau est souvent abordé dans la littérature scientifique et le professeur Vanclooster indique que « le changement climatique affecte aussi le climat belge. Bien que les précipitations hivernales aient augmenté au cours du siècle dernier, il n’y pas de changement observé au cours des précipitations printanières et estivales. Toutefois, la plupart des modèles climatiques de référence prévoient que le changement climatique accentuera le caractère saisonnier des précipitations ». Une étude menée par Tabari, Taye et Willems (2015) montre que les étés devraient être plus secs et les hivers plus pluvieux dès la fin du XXIe siècle. Cela augmentera le risque d’inondations en hiver et entraînera des épisodes de sécheresse plus fréquents et persistants en été, réduisant ainsi les réserves en eau (AEE, 2018). Le chercheur en hydrologie et gestion de l’eau nous rappelle que cela s’est démontré par « les cinq dernières années qui furent marquées par des vagues de chaleur (la dernière a eu lieu il y a moins d’un an, entre le 5 et 16 août 2020), des températures records et plusieurs périodes de pluviosité inférieures à la moyenne ».
En somme, ces différents éléments expliquent pourquoi la Belgique, et surtout la Flandre en conséquence de sa densité de population plus élevée et de ses caractéristiques géologiques et topographiques, dispose de relativement peu d'eau (Tabari, Taye and Willems, 2015), ainsi que le risque croissant d'une recrudescence des épisodes de sécheresse et de pénuries d'eau à l'avenir.
Élaboré conjointement par l’IWEPS, le SPW Environnement et le DENMA, le rapport « Risque de raréfaction des ressources en eau » (Maes et al., 2020) décrit les nombreux défis et conséquences qui résultent des pénuries d’eau en Belgique. Le rapport traite la question sous un point de vue environnemental (la dégradation de la qualité de l’eau, les menaces à la biodiversité, etc.), socio-économique (impact des sécheresses sur l’agriculture, sylviculture, la production d’eau potable ; impact d’un débit de base faible sur la production d’électricité, le transport, etc.), politique et géopolitique (le partage des ressources, l’adaptation et action climatique, etc.).
En termes de réglementation et plans d’action, l’eau a gagné du terrain sur l’agenda politique destiné à répondre à cette question. À l’échelle européenne, la Directive-cadre sur l’eau (DCE) a été lancée en 2000 et est régulièrement étoffée de lois européennes spécifiques afin d’établir une stratégie de lutte contre la pénurie d’eau et la sécheresse dans l’UE. En 2012, le lancement du Plan d'action pour la sauvegarde des ressources en eau de l'Europe fut une étape majeure provenant de la Feuille de route pour une Europe efficace dans l'utilisation des ressources qui gouverne la politique européenne de l’eau à long terme. En Belgique, des plans régionaux de gestion de l'eau ont été implémentés à Bruxelles, en Flandre et en Wallonie pour accomplir les actions provenant de la DCE de l'UE, et sont régulièrement révisés et complétés. « Ces plans de gestion de l’eau comprennent différentes mesures qui visent à atteindre un bon statut écologique pour les différentes surfaces et masses d’eau souterraines », confirme le Professeur Vanclooster. Pourtant, il attire l’attention sur « la nécessité de mesures complémentaires étant donné que les sécheresses des cinq dernières années ont montré que l’exposition et la vulnérabilité élevées de différents secteurs en Belgique à la sécheresse. De plus, le nombre croissant d'événements pluvieux exceptionnels contribue à exercer une pression sur l'infrastructure hydraulique actuelle, ce qui entraîne fréquemment des inondations indésirables. Il convient donc de consacrer davantage d'efforts à des politiques de l'eau globales et durables. Dans cette optique, le Blue Deal lancé en 2020 par le gouvernement flamand est un parfait exemple de la manière dont les politiques de l'eau peuvent être consolidées pour faire face aux nombreux défis liés à l'eau ».
La recherche et l’innovation répondent de différentes manières aux questions liées à l’eau et à la lutte contre les sécheresses et les inondations. Les analyses et prévisions des chercheurs notamment sur la disponibilité en eau, la qualité de l’eau et l’impact du changement climatique donnent aux législateurs les informations et outils nécessaires à la prise de décision. Toutefois, le secteur de l’eau requiert encore des recherches et avancements comme l’explique Marnik Vanclooster « l’incertitude au sujet de la présente et future disponibilité des ressources en eau demeure considérable. Les nouvelles technologies SMART permettraient d'établir des diagnostics plus rigoureux et plus précis du système d'approvisionnement en eau, ce qui garantirait une gestion de l'eau plus précise et adaptée aux conditions locales. Des modèles plus avancés, basés sur les big data relatives à l'eau issues de l'internet des objets dans les secteurs de l'eau, permettront de faire des prédictions plus précises sur l'évolution des ressources en eau afin d'assurer une gestion plus spécifique de l'eau dans différents secteurs ».
Parallèlement, des initiatives privées voient également le jour afin de lutter contre les problèmes liés à l'eau et des technologies, comme celle développée par Shayp, offrent des possibilités concrètes pour une gestion plus durable de l’eau, dans le secteur du bâtiment pour le cas présent. L’augmentation en nombre et en intensité des sécheresses ne pourra pas être évitée au XXIe siècle en raison de l’impact du changement climatique. Ainsi, tous les efforts comptent : du secteur public comme du privé, des initiatives locales et globales, sans oublier la sensibilisation et le changement de nos habitudes quant à l’utilisation de l’eau.
Shayp est une entreprise technologique belge spécialisée dans l'analyse de la consommation d'eau et la détection rapide des fuites. Elle aide les propriétaires et les gestionnaires de biens immobiliers à économiser en moyenne 20 % sur leur facture d'eau grâce à une technologie unique, non invasive et simple d’utilisation, labellisée par la Fondation Solar Impulse. Economiser l'eau et économiser sur sa facture devient un choix rationnel et facile.
Depuis sa création en octobre 2017, la solution de Shayp fait ses preuves et obtient des résultats significatifs auprès d'organisations publiques et privées (villes, communes, hôpitaux, écoles, complexes d'appartements, assureurs, etc.), les aidant à économiser des centaines de millions de litres d'eau par an et à réduire significativement leur facture d'eau grâce à l’optimisation de la maintenance.
Reconnue comme la startup belge de l'année par les Belfius Smart Belgium Awards en 2018, récompensée par le Seal of Excellence de la Commission européenne et l'une des huit meilleures startups mondiales du secteur de l'assurance lors du Zurich Innovation World Championship, Shayp combine innovation, simplicité et écologie dans sa solution unique, et contribue à une utilisation consciente de l'eau et à rendre les bâtiments plus résilients et durables.